Excitons dans le nitrure de bore hexagonal et ses homostructures en rotation : propriétés de volume, aux surfaces et aux interfaces

Résumé

Le nitrure de bore hexagonal (hBN) est un semi-conducteur à large bande interdite qui joue un rôle stratégique dans la famille des matériaux 2D en raison de propriétés telles qu’une luminescence UV intense ou son rôle protecteur pour les autres matériaux 2D. L’assemblage de différents matériaux 2D pour former des hétérostructures de matériaux 2D (h2D) offre des perspectives intéressantes pour l’ingénierie de leurs propriétés optiques et électroniques. Cela nécessite une compréhension des
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propriétés intrinsèques de chaque matériau 2D, mais aussi des influences réciproques des matériaux assemblés les uns sur les autres, ainsi que des effets de surface et d’interface.
Cette thèse est centrée sur les propriétés des excitons à la base de la luminescence du hBN. Il s’agit d’étudier sur des cristaux hBN, leur dynamique spatiale et temporelle en volume, leur diffusivité et l’effet recombinant de la surface pour ensuite aborder en détail les phénomènes d’émission lumineuse aux interfaces entre deux cristaux de hBN désorientés formant une homostructure hBN-hBN en rotation. Ces études ont été réalisées avec le dispositif de cathodoluminescence (CL) résolue en temps du GEMaC, qui permet un contrôle spatial et temporel de l’excitation, bien adapté à l’étude de la dynamique excitonique. Les expériences ont été menées sur des monocristaux de hBN de différentes qualités selon leur technique de synthèse et sur des homostructures hBN-hBN assemblées à partir de fragments exfoliés de cristaux massifs.
L’étude de la dynamique de déclin de l’exciton libre en volume de différents cristaux hBN a d’abord permis de mesurer sa durée de vie radiative, qui est une donnée intrinsèque au matériau, à 27 ns. Cette très faible valeur nous a permis de comprendre l’origine de la forte efficacité de luminescence du hBN, qui est un sujet débattu depuis plus de 10 ans. Il est ainsi établi que l’efficacité de luminescence est due à la compacité spatiale de l’exciton qui rend sa désexcitation radiative particulièrement efficace. Le rôle des défauts cristallins sur la durée de vie de l’exciton est identifié et discuté à partir de l’étude comparative de cristaux de différentes qualités.
Ensuite, nous avons étudié la diffusion des excitons et leurs recombinaisons aux surfaces du hBN grâce à un nouveau protocole expérimental en CL qui utilise les recombinaisons de surface comme sonde de la diffusion de l’exciton. L’application du protocole a permis de mesurer la diffusivité hors du plan (jusqu’à 0.2 cm2.s−1 pour le meilleur échantillon) et la vitesse de recombinaison de surface (≥ 105
cm.s−1). La surface de hBN se révèle être au niveau des plus recombinantes des semiconducteurs connus. Ces résultats ont été exploités pour dimensionner les homostructures hBN-hBN de façon à maximiser le transfert des excitons vers l’interface entre les deux cristaux.
Enfin, un phénomène de luminescence intense et large observé à 300 nm à l’interface des homostructures hBN-hBN désorientées a été étudié en détail. Une série d’expériences menées en excitation continue et en dynamique a permis d’établir que cette bande d’émission est alimentée de façon très efficace par le transfert et le piégeage d’excitons libres à l’interface. Son rendement quantique interne peut atteindre 100% pour des angles de désorientation proche de 30°. L’ensemble des résultats est cohérent avec l’attribution proposée pour cette bande à la recombinaison d’excitons auto-piégés à l’interface. L’étude des déclins de luminescence en fonction de la température a mis en évidence une barrière d’énergie à la formation des excitons auto-piégés de 10 meV et un potentiel de piégeage de l’interface pour les excitons de 100 meV aux angles de 11 et 15°.
Le dernier volet de la thèse traite de la fabrication de centres colorés dans le hBN par implantation ionique et irradiation électronique. L’effet de ces techniques sur la luminescence du hBN est étudié en CL et en photoluminescence afin d’évaluer l’application potentielle des centres créés pour les technologies quantiques.

Candidat:
Sébastien Roux

Jury:
Dr. Gwénolé Jacopin – Institut Néel, Grenoble- Rapporteur
Pr. Christophe Voisin – LPES, Sorbonne Université – Rapporteur
Dr. Claudio Attaccalite – CINaM, Aix-Marseille Univ. – Examinateur
Dr. Stéphane Collin – C2N, Université Paris-Saclay – Examinateur
Pr. Catherine Journet – LMI, Université Claude Bernard Lyon 1  – Examinatrice
Dr. Cédric Robert – LPCNO, Insa Toulouse – Examinateur
Pr. Julien Barjon – GEMaC – Directeur de thèse

Dr. Annick Loiseau – ONERA – Directrice de thèse
Dr. Christophe Arnold – GEMaC – Directeur de thèse

Mercredi 24 mai 2023 à 14h00
Salle Contensou, ONERA, 29 Avenue de la Division Leclerc,92320, Chatillôn

Synthèse par CVD de films de nitrure de bore aux propriétés optimisées pour dispositifs en optoélectronique

Résumé

Dans la famille des matériaux bidimensionnels (2D), le nitrure de bore a été identifié comme un matériau stratégique. Ce semi-conducteur à grand gap (>6eV), atomiquement plan, résistant chimiquement et thermiquement, peut jouer plusieurs rôles dans les hétérostructures de matériaux 2D : substrat de graphène pour préserver la mobilité exceptionnelle de ses porteurs de charge ou couche encapsulante pour protéger d’autres matériaux 2D sensibles à leur environnement ou exalter leurs propriétés. Des démonstrateurs de principe ont été réalisés avec des monocristaux de BN. Les dimensions latérales et l’homogénéité en épaisseur du BN sont limitées par la dimension initiale millimétriques des cristaux et leur mise en oeuvre par exfoliation mécanique. Cette technique est donc difficilement industrialisable. Il est nécessaire de développer des synthèses de films de BN de dimensions, structure et qualité contrôlées pour permettre une montée en échelle. Dans cette thèse en partenariat avec la PME Annealsys, nous avons choisi de développer la synthèse de films de BN sur nickel par dépôt chimique en phase vapeur à basse pression (LPCVD). Dans un premier temps, nous avons transposé sur le bâti de l’équipementier Annealsys le procédé de synthèse de BN sur des substrats de nickel polycristallin à partir de borazine déjà maitrisé par l’équipe. Nous avons confirmé que la morphologie et la qualité du BN dépend de l’orientation cristallographique du nickel sous-jacent et que l’orientation (111) du nickel est la plus favorable pour la synthèse de film continu de BN. Nous avons donc ensuite travaillé avec des substrats monocristallins de Ni(111) /YSZ/Si(111). Nous avons porté une attention particulière à la préparation de ces substrats spécifiques et développé un traitement de stabilisation in-situ dans le bâti de dépôt, compatible avec un procédé industriel. La structure et la qualité des films de BN synthétisés, i.e. épaisseur, rugosité, séquence d’empilement, cristallinité et taille de domaines, ont été caractérisées de l’échelle atomique à l’échelle millimétrique par un panel de techniques de microscopies et spectroscopies (AFM, MEB, Raman, MET. . .). Nous avons mis en place une méthodologie de caractérisation statistique à l’échelle centimétrique, indispensable à la vérification de l’homogénéité des films de BN, prérequis pour la fabrication de dispositifs performants. Nous avons fait varier des paramètres de synthèse clés tels que la quantité de gaz précurseur ou l’épaisseur du substrat de nickel et étudié leur impact sur les films de BN. Les résultats sont discutés d’un point de vue mécanisme de croissance.

Candidate:
Laure Tailpied

Jury:
Pr. Luc Imhoff – Université de Bourogne- Rapporteur
Dr. Laëticia MARTY – Université Grenoble Alpes – Rapporteur
Dr. Berangère Toury – Université Lyon 1 – Examinatrice
Pr. Franck Vidal – Sorbonne Université – Examinateur
Dr. Jean-Manuel Decams – Annealsys – Invité
Dr. Amandine Andrieux-Ledier – ONERA – Encadrante
Dr. Annick Loiseau – ONERA – Directrice de thèse

Mercredi 25 avril 2023 à 14h00
Salle Contensou, ONERA, 29 Avenue de la Division Leclerc,92320, Chatillôn

Cristallographie des bicouches homophases désorientées par rotation-translation

Denis Gratias et Marianne Quiquandon
CNRS-UMR 8247 IRCP, Chimie-ParisTech PSL, Paris

On se propose de discuter la symétrie résultant de la superposition de deux couches monoatomiques cristallines identiques désorientées l’une par rapport à l’autre d’une rotation-translation (α|τ).
Un réseau de coïncidence apparaît —défini par le groupe intersection des groupes de translation des réseaux des monocouches— pour un ensemble dense dénombrable de valeurs de la rotation α, qu’on discutera en toute généralité pour les quatre types de réseaux bidimensionnels, oblique, rectangle, carré et hexagonal. Ces valeurs singulières d’angle α associées aux normes σ des vecteurs unitaires du réseau de coïncidence se répartissent dans le plan (α, σ) selon des branches indexées par des suites de Farey et dont on discutera les propriétés.
Pour une rotation donnée, les symétries spatiales de ces bicouches se répartissent en un
petit nombre seulement de groupes selon la valeur de la translation τ. Ainsi les bicouches de
graphène à réseau de coïncidence ne peuvent présenter que 6 types de groupes d’espace quelles que soient la rotation a de coïncidence et la translation τ.
Dans le cas générique d’absence de réseau de coïncidence, la bicouche présente une
symétrie quasipériodique de rang 4 au plus qu’on peut décrire par une méthode de coupe à partir d’un espace de dimension 4. On montrera l’importance fondamentale du réseau-0 (0-lattice) pour décrire les symétries des figures de moiré de ces édifices.

Conception de matériaux par voie numérique

Maxime Moreaud

IFPEN, Solaize

Depuis 2017, IFPEN est entrée pleinement dans la course à la conception accélérée de nouveaux matériaux avec des modèles créant des liens entre synthèse et propriétés effectives. Ses équipes IA et matériaux proposent de nouveaux outils de génération et de caractérisation numériques de microstructures de matériaux.  
Cette approche considère de façon réaliste la microstructure pour capter des détails morphologiques et topologiques aux échelles d’intérêts. Des modèles numériques font le lien avec des paramètres de synthèse ou de mise en forme, et estiment les propriétés texturales et d’usages. Lors de cet exposé, nous aborderons les idées générales de cette approche, des exemples de microstructures multi-échelles, et quelques récents travaux concernant les caractérisations numériques texturales comme la tortuosité et la simulation de physisorption accélérée par apprentissage profond.

Rydberg atoms: a versatile tool for quantum technologies

Sylvain Schwartz

Laboratoire QTECH (ONERA)

Rydberg atoms are by definition atoms which have been excited to a state with a large principal quantum number, resulting in exaggerated properties such as a large atomic size, a long lifetime compared to other excited states and large matrix elements for the dipole operator. In practice, dipole-dipole interactions between Rydberg atoms are at the heart of quantum simulations, where they are used to create entangled atomic states. But the large dipole of Rydberg atoms can also result in a strong coupling with external electromagnetic fields, making these atoms good candidates to be used as very sensitive probes of electromagnetic environment in the GHz to THz range. I this talk, I will give a brief overview of the state of the art of quantum simulation and quantum metrology with Rydberg atoms, and present the ongoing project that we have in the QTech lab at ONERA about quantum metrology with cold Rydberg atoms trapped in optical potentials. Possible applications include electromagnetic intelligence, THz imaging and scientific applications such as the calibration of black-body shifts in state-of-the-art optical clocks (in collaboration with SYRTE and laboratoire Aimé Cotton).

Etude atomique de la plasticité des métaux de transition cubiques centrés

Baptiste Bienvenu, Chu Chun Fu et Emmanuel Clouet

Université Paris-Saclay, CEA, Service de Recherches de Métallurgie Physique, 91191 Gif-sur-Yvette

A basse température, la plasticité des métaux de transition cubiques centrés (CC) s’opère par le glissement dans les plans compacts {110} des dislocations vis de vecteur de Burgers ½<111>, subissant une forte friction avec le réseau cristallin. L’objectif de ce travail est de construire des lois d’écoulement plastique à partir de l’étude à l’échelle atomique des propriétés de coeur et de la mobilité de ces dislocations vis (par calculs ab initio et de dynamique moléculaire), permettant de les relier à des propriétés mécaniques macroscopiques (limite élastique, activité des systèmes de glissement).
Dans le cadre de cette étude, une attention particulière est portée au cas du chrome (Cr), le seul de ces métaux ayant une structure proche de l’antiferromagnétisme, une onde de densité de spins, en-dessous de la température ambiante. Afin de qualifier l’influence du magnétisme sur la plasticité du Cr, des calculs ab initio à température nulle ont été couplés à des simulations Monte Carlo à température finie. Cette étude a permis de conclure à une influence marginale du magnétisme, mis à part à très basse température où le vecteur de Burgers ½<111> des dislocations génère des fautes magnétiques puisque celui-ci ne respecte pas l’ordre magnétique du Cr.
Par la suite, une étude systématique portant sur l’ensemble des sept métaux de transition CC (vanadium, niobium, tantale, chrome, molybdène, tungstène et fer) a permis de développer un critère d’écoulement reproduisant les caractéristiques expérimentales des effets dits « non-Schmid », une spécificité de ces métaux à basse température. Cependant, certains effets ne peuvent pas être décrits par ce critère, tenant uniquement compte du mouvement de dislocations isolées. C’est le cas par exemple du glissement anomal, observé dans tous les métaux CC excepté le fer, et caractérisé par le glissement de dislocations ½<111> dans des plans {110} faiblement sollicités. A partir d’observations in situ dans un microscope électronique en transmission réalisées par Daniel Caillard (CEMES-CNRS, Toulouse), couplées à des simulations atomiques, un nouveau mécanisme expliquant ce phénomène dans l’ensemble des métaux CC a été mis en évidence, basé sur la mobilité exceptionnelle de multi-jonctions. Enfin, la mobilité de dislocations ayant un vecteur de Burgers <100>, le plus souvent observées sous forme de jonctions entre dislocations ½<111> mais rarement considérées comme des systèmes de glissement possibles, a été étudiée par simulations atomiques. Il a été mis en évidence que, malgré une mobilité compétitive des dislocations vis <100> avec les conventionnelles ½<111> dans les plans {110}, les dislocations <100> se bloquent à basse température selon une orientation mixte nécessitant une contrainte très élevée pour se déplacer, expliquant ainsi leur faible activité.

Ladislas Kubin nous a quittés

C’est avec une très grande tristesse que nous avons appris le décès de notre collègue Ladislas Kubin, survenu le 18 octobre 2022.

Diplômé de l’École Centrale Paris en 1966, Ladislas Kubin mène ses travaux de thèse au Laboratoire de Physique des Solides de l’Université d’Orsay. Recruté au CNRS en 1968, il y mène toute sa carrière de chercheur, d’abord au Laboratoire d’Optique Électronique à Toulouse, puis au Laboratoire de Métallurgie Physique à Poitiers et enfin au Laboratoire d’Étude des Microstructures, unité mixte de recherche ONERA-CNRS qu’il intègre dès sa création en 1988 et où il poursuivra sa carrière jusqu’à son éméritat en 2008.

Physicien hors pair, Ladislas Kubin a profondément marqué le domaine de la physique de la plasticité par des recherches expérimentales et théoriques traitant du comportement individuel et collectif des dislocations afin de mieux comprendre les mécanismes de déformation des métaux et alliages cristallins. Sur le plan expérimental, il s’est attaché à développer, dans la première partie de sa carrière, des moyens d’étude in situ du comportement individuel des dislocations en microscopie électronique en transmission. Ces travaux l’ont conduit ensuite à développer des modèles précurseurs pour la prédiction des phénomènes de vieillissement dynamique dans les alliages tel que l’effet Portevin-Le Chatelier, puis au tournant des années 90 à initier une approche originale de simulation mésoscopique des mécanismes de la déformation plastique des métaux. Il a ainsi été l’un des fondateurs de l’école française de la dynamique des dislocations et l’un des premiers à établir le lien entre leur comportement et la réponse plastique des matériaux métalliques.

Spécialiste internationalement reconnu, Ladislas Kubin a été éditeur pour la revue Acta Materialia et l’auteur du livre « Dislocations, mesoscale simulations and plastic flow ». Il a reçu les médailles de bronze et d’argent du CNRS et le prix Gay-Lussac Humboldt.

Ladislas a formé de nombreux doctorants, post-doctorants et interagi avec beaucoup de chercheurs en France et à l’étranger. Ses connaissances dans les domaines de la modélisation et des expériences étaient vastes et recherchées.

Un grand physicien et un collègue apprécié s’en est allé. Son souvenir et son enseignement demeurent.
Ses obsèques se dérouleront mardi 25 octobre 2022 à 14h30 à l’église Saint Charles à Biarritz.
Nos pensées vont à sa famille et à ses proches à qui nous présentons nos sincères condoléances.

Le LEM

Modèles pilotés par les données de simulations atomiques dans des espaces d’états discrets et continus

Thomas Swinburne

CINaM, Marseille

Construire des modèles pour la plasticité, la thermodynamique et la cinétique des métaux est un défi car les aspects subtils de la cohésion atomique doivent être fidèlement reproduits et les prédictions nécessitent souvent une moyenne sur de grands ensembles de configuration complexes. Je discuterai de la manière dont les paysages énergétiques des systèmes atomiques peuvent être rapidement explorés à grande échelle et « coarse-grained » lorsque la dynamique est thermiquement activée, donc séparée en échelle [1,2] et comment les techniques basées sur les données, généralement utilisées pour régresser les énergies pour les modèles cohésifs modernes, peuvent être utilisés pour capturer une gamme beaucoup plus large de propriétés telles que l’entropie des défauts[3] ou les propriétés de dislocation. Lorsque la dynamique n’a pas une séparation d’échelle de temps claire, le grain grossier est beaucoup plus difficile. Je discuterai de la manière dont une approche basée sur les données peut fournir une solution, produisant des modèles de substitution efficaces qui peuvent prédire l’évolution des ensembles de nanoparticules et le rendement de microstructures complexes, offrant de nouvelles perspectives pour les approches de modélisation multi-échelles[4].

 

[1]  TD Swinburne and D Perez, NPJ Comp. Mat 2020, MSMSE 2022
[2]  TD Swinburne and DJ Wales JCTC 2020, 2022
[3]  C Lapointe et al. PRMat 2020
[4]  TD Swinburne, In Prep.

Propriétés optiques du phosphore noir : du cristal massif aux couches atomiques

Résumé

Le phosphore noir est un semi-conducteur à petit gap (environ 0.3 eV) ayant récemment rejoint la famille des matériaux bidimensionnels. Sa bande interdite modulable du moyen infrarouge au visible selon l’épaisseur, sa forte anisotropie dans le plan atomique ainsi que la grande mobilité des porteurs de charges lui promettent un haut potentiel applicatif dans le domaine de l’optoélectronique. L’objectif de cette thèse a été d’étudier les propriétés optiques du cristal de phosphore noir ainsi que de ses feuillets atomiques.

Après une description des différents développements instrumentaux réalisés au cours de cette thèse, les méthodes de fabrication des échantillons sont abordées. Deux points sont à maîtriser : l’élaboration de couches fines et leur protection des conditions ambiantes pour éviter leur oxydation. Dans une première partie, plusieurs méthodes dites « Top-Down » (exfoliation mécanique et assistée à l’or, gravure ionique) sont comparées sur la base de la qualité, la taille, l’épaisseur des échantillons obtenus ainsi que de la facilité d’exécution du mode opératoire. La seconde partie présente deux méthodes de protection des couches fines: la passivation à l’alumine (par ALD ou évaporation d’aluminium) et l’encapsulation dans des feuillets de hBN (hétérostructure hBN/BP/hBN).

La forte anisotropie du phosphore noir fait que la détermination de l’orientation des axes cristallographiques est un point clé dans l’étude du matériau. Dans ce but, un mode opératoire a été proposé qui utilise la spectroscopie Raman polarisée. Celui-ci a été confronté puis validé par différents moyens expérimentaux (observations TEM, EBSD) et théoriques (modélisation de l’intensité Raman dans des couches fines). Les propriétés vibrationnelles ont également été étudiées en fonction du nombre de couches atomiques. Plusieurs effets ont été remarqués à haute (> 100 cm-1) et basse (< 100 cm-1) fréquences et sont

attribués à la réduction de dimensionnalité et à des phénomènes de résonnance. Grâce aux conditions expérimentales d’excitation utilisées, un grand nombre de modes relatifs aux vibrations inter-plans sont mis en évidence pour la première fois et se sont révélés être des indicateurs précis de l’épaisseur des cristallites.

La photoluminescence du cristal massif a été étudiée pour la première fois à température ambiante et cryogénique. Plusieurs composantes d’émission en bord de bande de nature excitonique ont été identifiées dont une raie fine due à l’exciton libre. L’analyse de leur comportement en fonction de la température ainsi qu’un calcul de l’énergie de liaison de l’exciton libre prenant en compte l’anisotropie du milieu ont permis d’établir une nouvelle valeur de référence du gap du phosphore noir à 0.287 eV à 2 K. L’étude en photoluminescence des cristaux exfoliés a révélé la disparition de la raie fine de luminescence au profit d’une bande large. Ce changement est attribué à la densité de défauts introduits par l’exfoliation mécanique ainsi qu’en atteste l’élargissement des bandes en spectroscopie Raman. La bande de photoluminescence a été suivie en fonction de l’épaisseur des couches exfoliées jusqu’à 8 couches atomiques. En dessous d’une épaisseur seuil évaluée à 25 nm, un décalage de la bande vers les hautes énergies est mis en évidence, dont le comportement est très bien décrit par un modèle de confinement quantique. Aucune différence significative n’est observée entre les échantillons passivés alumine et encapsulés dans du hBN ce qui indique que les effets de diélectriques ne sont pas prépondérants dans la gamme d’épaisseur étudiée.

Mots clés: Phosphore noir, Matériaux 2D, Photoluminescence infrarouge, Spectroscopie Raman

Candidat:
Etienne Carré

Jury:
Christophe TESTELIN – Directeur de recherche, CNRS, Sorbonne Université – Rapporteur
Laëticia MARTY – Chargée de recherche, CNRS,Université Grenoble Alpes – Rapporteur
Bruno MASENELLI – Professeur des universités, INSA Lyon – Examinateur
Aurélie PIERRET – Ingénieure de recherche, CNRS, École Normale Supérieure Paris – Examinatrice
Pierre SENEOR – Professeur des universités, CNRS, Université Paris Saclay – Examinateur
Annick LOISEAU – Directrice de recherche, ONERA, Sorbonne Université – Directrice de thèse
Julien BARJON – Professeur des universités, UVSQ – Directeur de thèse
Ingrid STENGER – Maîtresse de conférences, UVSQ – Encadrante

 

Jeudi 23 Juin 2022 à 14h30
Salle Contensou, ONERA, 29 Avenue de la Division Leclerc,92320, Chatillôn

Modélisation de la propagation d’une fissure courte en matériau ductile par couplage entre champ de phase et dynamique des dislocations

Résumé

Dans ce travail, nous proposons un nouveau couplage entre deux méthodes à l’échelle mésoscopique permettant d’étudier l’interaction d’une fissure mobile avec une microstructure de dislocations en trois dimensions. En premier lieu, la propagation d’une fissure est modélisée par un modèle de champ de phase. Dans cette approche, la fissure est décrite par un champ d’endommagement continu dont la propagation est pilotée par la minimisation de l’énergie libre du système, intégrant l’énergie élastique stockée dans le matériau et l’énergie de surface associée aux lèvres de la fissure. En second lieu, la microstructure de dislocations est décrite par un modèle de Dynamique des Dislocations (DD). Ce type de modèle permet en effet de simuler la déformation plastique par le mouvement des dislocations sous chargement externe.

Pour réaliser le couplage, nous avons utilisé l’approche dite MDC (Modèle Discret-Continu) où les dislocations sont représentées par des champs (eigenstrain ou tenseur de Nye) dans un solveur élastique. Pour des raisons d’efficacité, nous avons utilisé des solveurs à base de transformées de Fourier rapides (FFT). L’utilisation de schémas de discrétisation particuliers nous ont permis de minimiser l’étalement des cœurs de dislocation, adopté généralement dans les approches MDC. Nous avons étudié les différents schémas en identifiant leurs performances en terme de qualité des champs prédits. Par ailleurs, nous avons porté une attention parti- culière à l’optimisation de l’implémentation en recourant à la parallélisation de nos algorithmes.

Grâce à ce nouveau couplage, nous avons pu étudier l’écrantage élastique sur la propa- gation de fissure suivant la nature des systèmes de glissement et la densité de dislocations présentes, mais également des phénomènes et d’ingrédients rarement pris en compte comme le glissement dévié des dislocations proches du front de fissure ou encore le nombre de sources environnantes. Cette méthode mésoscopique constitue une avancée pour l’analyse fine des mécanismes physiques contrôlant les premiers stades de la rupture des matériaux métalliques.

Mots clés : Fissure, Plasticité, Modélisation multi-physique, Dynamique des Dislocations, Champ de phase

Candidat:
Luis Eon

Jury:
Stéphane Berbenni – Directeur de Recherche CNRS, LEM3, Metz – Rapporteur
Samuel Forest –  Directeur de Recherche CNRS, CDM, Evry  – Rapporteur
Véronique Doquet – Directrice de Recherche CNRS, LMS, Palaiseau  – Examinatrice
Lionel Gélébart – Ingénieur-chercheur HdR,  CEA/DEN, Gif-sur-Yvette – Examinateur
Rénald Brenner – Directeur de Recherche CNRS, D’Alembert, Paris – Examinateur
Yoann Guilhem – Maître de conférences, LMPS, Gif-sur-Yvette – Examinateur
Riccardo Gatti – Chargé de Recherche CNRS, LEM, Châtillon – Encadrant de thèse
Benoît Appolaire – Professeur des Universités, IJL, Nancy – Directeur de thèse

Mardi 14 Juin 2022 à 10h00
Salle Contensou, ONERA, 29 Avenue de la Division Leclerc,92320, Chatillôn

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